INTERVIEW - Carlos Quenan, spécialiste de l'Amérique latine, revient sur le coup d'Etat, dimanche, au Honduras...
Manuel Zelaya était un président élu, qui bénéficiait du soutien de la population. Mais il a eu un parcours particulier: élu en tant que libéral, il a opéré un virage vers la gauche, notamment en renforçant ses relations avec le Venezuela. Sa volonté était de rejoindre l’Alba, l’Alternative bolivarienne pour les Amériques, proposée par Hugo Chavez, et qui se veut une alternative à la ZLEA, la Zone de libre échange pour les Amériques, défendue, elle, par les Etats-Unis. L’Alba proposait des projets de coopération intéressants, notamment pour l’achat du pétrole. Donc progressivement, Manuel Zelaya s’est rapproché d’elle, essentiellement pour des raisons économiques. Mais au fur et à mesure, il y a eu une plus grande proximité avec Hugo Chavez.
Mais ce qui explique le coup d’Etat, c’est la consultation populaire que voulait faire Manuel Zelaya afin de changer la constitution. Il visait une réélection (pas prévue dans la constitution du Honduras, ndlr). Mais au-delà de cela, rien ne justifie ce coup d’Etat.
Y a-t-il des risques de débordements?
Evidemment, il peut y en avoir. D’autant plus que je pense que les organisateurs du coup d’Etat ne s’attendaient pas à avoir un accueil aussi défavorable sur la scène internationale. Parmi ceux qui ont des critiques à l’égard de Manuel Zelaya, certains estiment que la méthode n’est pas la bonne. Il risque donc d’y avoir des militants dans la rue, mais aussi des personnes s’opposant au coup d’Etat. Et puis les gens n’ont pas envie de voir ressurgir des coups d’Etat militaires en Amérique latine. Ca fait une quinzaine d’années qu’ils avaient été oubliés...
Néanmoins, il faut bien voir que pour le moment, la majorité de la population est attentiste, sauf les militants les plus engagés. Elle attend de voir le positionnement de la communauté internationale.
Que peut-il se passer dans les heures et les jours à venir?
La question centrale est de savoir ce qui va sortir des négociations internationales des prochaines heures, et voir ce que cela peut infléchir.
Je pense qu’on devrait arriver à des négociations, mais il faut voir dans quels termes. Peut-on faire marche-arrière dans le processus entamé? Il faudra voir si Manuel Zelaya est prêt à cela.