Par Pierre Prier
25/05/2010 | Mise à jour : 22:12 Réaction (2)

L'affrontement entre les forces de l'ordre et le gang de Dudus,puissamment armé, a déjà fait 27 morts, principalement des civils.

L'affrontement entre les forces de l'ordre et le gang de Dudus, puissamment armé, a déjà fait 27 morts, principalement des civils. Crédits photo : REUTERS

Le gouvernement s'est résolu à s'attaquer à un parrain de la drogue dont les États-Unis réclament l'extradition. Les affrontements des forces de sécurité avec son gang sont si meurtriers que l'état d'urgence a été décrété.

Une atmosphère de guerre régnait mardi à Kingston, la capitale jamaïquaine. Plusieurs milliers de policiers et de soldats combattaient toujours dans le quartier de Tivoli Gardens, fief de l'un des plus puissants parrains de la drogue du pays, le bien nommé Christopher Coke, dit «Dudus».

L'affrontement entre les forces de l'ordre et le gang de Dudus, puissamment armé, a déjà fait 60 morts, principalement des civils, selon un bilan communiqué par des sources hospitalières mardi soir. Les policiers et les soldats se battaient contre des combattants en cagoule noire, au milieu des explosions et des bâtiments en flammes, tandis que des hélicoptères survolaient la ville. L'état d'urgence a été déclaré pour un mois.

À Washington, le Département d'État a averti que les troubles risquaient de s'étendre en dehors de la ville. L'accès à l'aéroport est bloqué. Le premier ministre Bruce Golding a juré de «combattre les puissances du mal qui minent la société et nous valent d'être classés comme une des capitales du crime dans le monde».

Christopher Coke (photo nondatée), le chef de la «bande de la douche», ainsi surnommée pour sapropension à noyer ses ennemis sous les balles.

Christopher Coke (photo non datée), le chef de la «bande de la douche», ainsi surnommée pour sa propension à noyer ses ennemis sous les balles. Crédits photo : Reuters

C'est sa décision d'extrader Dudus vers les États-Unis, après avoir longtemps hésité, qui a déchaîné ces «puissances du mal». Les barricades ont surgi dans le quartier de Tivoli Gardens peu après l'annonce, le 18 mai, de la signature de l'acte d'extradition, signe d'une insurrection planifiée. Dudus est en effet «wanted» par le gouvernement américain, qui le considère comme un des principaux distributeurs de marijuana et de crack à New York et dans d'autres villes américaines.

À la Jamaïque, il est redouté comme chef du Shower Posse, la «bande de la douche», ainsi surnommée pour sa propension à noyer ses ennemis sous les balles. Mais Dudus est aussi un parrain mafieux traditionnel, populaire parmi les pauvres, à qui il redistribue les miettes de ses bénéfices. Ce qui facilite son travail d'agent électoral.

Collusion entre malfrats et hommes politiques

Dudus a les moyens de faire voter les électeurs des quartiers pauvres pour le Parti travailliste jamaïquain au pouvoir. Le recours aux gangs est l'une des caractéristiques de la Jamaïque, pays violent et miné par la drogue et le banditisme, loin de son image d'un État «cool» vivant au rythme du reggae.

Cette collusion entre gangsters et hommes politiques explique pourquoi le premier ministre a attendu aussi longtemps avant de satisfaire la demande américaine, formulée il y a neuf mois. Encore ne s'y est-il résigné que contraint et forcé, après que la presse a révélé qu'il avait engagé un cabinet de lobbyistes à Washington. Pas pour l'aider à l'extradition de Dudus, mais au contraire pour lui trouver des moyens légaux de la refuser.

C'est la gangrène du système politique jamaïquain qui est exposée au grand jour. «Si M. Golding veut vraiment lutter contre les puissances du mal, écrit le quotidien Jamaica Gleaner, il devra rompre tous les liens de son parti avec les hommes de la violence.»

Air du temps	2
Amérique Latine	12
Argentine	17
Avertissement	2
Blog Out	1
...

253	Articles
159	Commentaires

2015	3
2014	2
2013	2
2012	14
2011	5
...

Honduras	46
Chavez	40
Chili	31
Zelaya	31
Cuba	29
...

Jamaïque: l'assaut de l'armée contre les gangs fait 60 morts